Prise de position sur l’obligation scolaire
Le 2 octobre 2020, en présentant son « plan contre les séparatismes » 1, le président Macron a annoncé l’école obligatoire pour tous les jeunes de 3 à 16 ans, dès la rentrée scolaire 2021 2. Malgré les protestations immédiates des associations d’instruction en famille, la mesure a été réaffirmée plusieurs fois à l’occasion de différentes interviews.
L’OVEO s’oppose fermement à cette mesure – prévue en lecture en conseil des ministres le 9 décembre 2020 3 – et affirme son soutien aux associations et familles dans leur contestation.
Une telle interdiction porte atteinte au droit des enfants à faire des choix pour ce qui les concerne. Ironie de la situation, si des enfants devaient être scolarisés contre leur gré, les parents, pour respecter cette nouvelle loi, se trouveraient de fait dans l’obligation d’en enfreindre une autre, votée en juillet 2019, qui spécifie dans l’article 371-1 du Code civil 4 : « L’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ou psychologiques. » En effet, comment obliger un enfant à se rendre dans un établissement et lui imposer un enseignement sans exercer une forme ou une autre de violence (menace, chantage, manipulation ou toute autre manière d'obtenir l’obéissance) ?
Au nom des valeurs de la République, la loi contraindrait donc tous et toutes à se conformer à une unique norme éducative et pédagogique. Ceci est incompatible avec le respect des objectifs affichés de l’Éducation nationale (épanouissement de l’enfant, respect des différences, liberté de pensée et d’expression…).
Cette annonce démontre que l’État considère par défaut les familles comme défaillantes et s’estime plus à même de savoir ce qui est « pour le bien » 5 des enfants que les principaux concernés.
Pour aller plus loin :
- Article de Daliborka Milovanovic (Le Gai Savoir) Instruction hors école : paradigme de liberté, ultime liberté
- Tribune dans Libération : Garantir la possibilité d’apprendre autrement (Yazid Arifi, cofondateur de l’Ecole démocratique de Paris, Elodie Bayart, anthropologue, Bernard Collot, instituteur retraité, Marc-André Cotton, enseignant, Manuèle Lang, journaliste, Olivier Maurel, professeur retraité, Daliborka Milovanovic, philosophe, Thierry Pardo chercheur, Ophélie Perrin, thérapeute, Audrey Vernon, comédienne)
- Lettre ouverte de la Ligue des droits de l’homme le 28 octobre 2020
- Lettre ouverte au ministre de l’Éducation nationale (OVEO, 27 avril 2020)
- Les membres de l’OVEO alertent sur l’impact délétère d’une loi dite « École de la confiance » (OVEO, 7 mars 2019)
Quelques citations :
« Les enfants ne sont faits ni pour qu’on leur apprenne à être meilleurs, ni pour qu’on leur dise ce qu’il doivent faire, ni pour qu’on leur montre comment y parvenir. S’il leur est donné un accès suffisant au monde qui les entoure, ils verront assez clairement ce qui est vraiment important pour eux ou pour les autres et ils se fraieront un meilleur chemin dans le monde que celui que d’autres auraient préparé pour eux. » (John Holt) – Articles citant John Holt sur notre site.
« Ce qu’ont réussi à faire tous les systèmes éducatifs (un bémol pour la Finlande) c’est d’insérer dans les têtes (les neurones !) des citoyens « c’est grâce à l’école…. », rendant impossible le « c’est à cause de l’école… » et rendant la présence et la conception de l’école comme immuables. » (Bernard Collot) – http://education3.canalblog.com/archives/2017/10/12/35761659.html
- En février, Emmanuel Macron parlait d’un plan de lutte contre le « séparatisme islamiste ». Le 4 septembre, au Panthéon, il évoquait « un projet de loi de lutte contre le séparatisme ». Son entourage emploie désormais le terme au pluriel. « Ce n’est pas un détail, car il s’agit d’englober ainsi toutes les formes de sécession vis-à-vis des lois de la République », indique l’Elysée.[↩]
- Après lecture du projet par le Conseil d’État le 7 décembre, décrétant cette interdiction anticonstitutionnelle, le projet s’oriente aujourd'hui vers un régime d’autorisation annuelle de l’autorité académique accordée seulement pour certains motifs : l’état de santé ou le handicap de l’enfant, la pratique d’activités sportives ou artistiques intensives, l’itinérance de la famille en France ou l’éloignement géographique d’un établissement scolaire, ou encore « l’existence d’une situation particulière de l’enfant, sous réserve alors que les personnes qui en sont responsables justifient de leur capacité à assurer l’instruction en famille ».[↩]
- Extrait de la déclaration d’E. Macron sur Public Sénat.[↩]
- Pour rappel, l’article stipule non seulement que « l’autorité parentale s’exerce sans violences physiques ou psychologiques », mais aussi que « les parents associent l’enfant aux décisions qui le concernent, selon son âge et son degré de maturité ».[↩]
- Voir le livre d’Alice Miller, C’est pour ton bien. Racines de la violence dans l’éducation de l’enfant, dont nous avons publié sur notre site un large extrait du 2ème chapitre, Existe-t-il une « pédagogie blanche » ?[↩]
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