Il est urgent de promouvoir la culture du respect de l’enfant comme “ultime révolution possible” et comme élément fondamental de transformation sociale, culturelle, politique et humaine de la collectivité.

Maria Rita Parsi, psychologue italienne.

Je ne faisais jamais bien…

Témoignage reçu en réponse au questionnaire du site.

Avez-vous subi vous-même de la violence éducative au cours de votre enfance ? Sous quelle forme ?

Des fessées, des gifles, des corrections à la pantoufle ou aux ustensiles de cuisine (spatules en bois), plus tout ce qui touche à l'émotionnel (critiques, jugements, insultes... ma mère m'a traitée de pute, m'a accusée d'être responsable de son cancer, j'étais la cause de tous ces maux, je ne faisais jamais bien)

A partir de et jusqu'à quel âge ?
A partir de... je ne sais plus vraiment, vers 4 ou 5 ans peut être? jusqu'à l'adolescence pour les coups (jusqu'à ce que ma mère casse sa spatule sur moi, veuille continuer à la main et se fasse plus mal que ce qu'elle voulait me faire mal... je me rappelle avoir ri de sa douleur en pensant "bien fait pour toi") Par contre les brimades et moqueries... jusqu'à ce que je parte loin d'eux!

Par qui ? (père, mère, grands-parents, autre personne de la famille ou de l'entourage, enseignant...)
Mère+++, Père moins souvent mais plus violent, instituteur aussi qui pinçait les joues quand les leçons n'étaient pas bien apprises. Je me suis fait gifler aussi une fois par une élève de ma mère (qui était prof), sous ses yeux... et qui n'a rien dit

Cette ou ces personnes avaient-elles elles-mêmes subi de la violence éducative dans leur enfance ? De quel type, pour autant que vous le sachiez ?
Ma mère a connu le martinet, mon père a aussi dû se faire corriger par sa propre mère. Il n'a jamais évoqué les coups mais nous parlait souvent d'une fois où il avait dû lui demander pardon à genoux alors qu'il avait 18 ans...ça l'avait vraiment traumatisé à l'entendre...

Vous souvenez-vous de vos sentiments et de vos réactions d'alors (colère, tristesse, résignation, indifférence, sentiment d'injustice ou au contraire de l'avoir “bien mérité”...) ?
De la haine... l'envie de les voir mourir... Ce n'était pas mérité la plupart du temps...
Je n'ai pas pleuré lors du décès de ma mère (j'avais 21ans), et je sais que je ne pleurerai pas mon père quand son tour viendra... (on ne se parle plus de toute façon)

Avez-vous subi cette(ces) épreuve(s) dans l'isolement ou avez-vous eu le soutien de quelqu'un ?
Isolement le plus total... mes soeurs étant bien plus âgées, elles avaient quitté la maison. Et quand je tentais de raconter ma souffrance à des proches, on me répondait que je n'étais qu'une vilaine petite ingrate. Il est vrai que mes parents étaient très forts pour donner l'illusion de la parfaite petite famille unie... J'ai appris récemment que je n'était pas désirée au sein de leur couple, et que lorsque j'ai eu 3 ans mon père a débuté une relation extraconjuguale avec une des meilleures amies de ma mère, et que cela a duré plus de 20 ans. Imaginez donc dans quel monde de mensonge et d'hypocrisie j'ai grandi!

Quelles étaient les conséquences de cette violence lorsque vous étiez enfant ?
L'envie de mourir, de disparaitre. J'ai voulu fuguer vers 7 ans, mais nous habitions à la campagne, dans un coin très reculé... difficile de partir à pied avec ma petite valise. J'étais donc partie me cacher au fond du jardin toute une après-midi pour leur faire peur... personne ne s'est aperçu de rien. Finalement, j'étais invisible pour eux, sauf quand ils avaient besoin de déverser leurs frustrations d'adultes sur quelqu'un

Quelles en sont les conséquences maintenant que vous êtes adulte ? En particulier vis-à-vis des enfants, et notamment si vous êtes quotidiennement au contact d'enfants (les vôtres, ou professionnellement) - merci de préciser le contexte ?
Difficultés à faire confiance, à nourrir des relations avec les gens (je connais beaucoup de monde mais j'ai du mal à me faire des amis, persuadée que tôt ou tard il réaliseront que je ne suis pas digne d'intérêt) manque colossal de confiance en moi. J'ai eu des comportements à risque vis-à-vis de l'alcool, du tabac, du cannabis, j'ai souffert de troubles du comportement alimentaire, j'ai pensé au suicide mais n'ai jamais osé sauter le pas. J'ai ensuite pratiqué le sport de façon frénétique (jusqu'à 25H par semaine, matin, midi et soir)
Je ne voulais pas avoir d'enfant, jamais. Je n'aimais pas les petits, je me sentais maladroite avec eux. Les pleurs des bébés m'horripilaient.
Je suis maman depuis quelques mois, ce n'était pas prévu, mais je me découvre une autre facette, douce, patiente, aimante... je vais faire tout mon possible pour casser l'engrenage de la violence éducative et ne pas reproduire cette éducation néfaste que j'ai reçue de mes parents.

Si vos parents ont su éviter toute violence, pouvez-vous préciser comment ils s'y sont pris ?

Globalement, que pensez-vous de votre éducation ?
Pourrie...ils sont complètement passés à côté; le pire c'est que je les entendais rabâcher à longueur de journée que la base de tout c'était la communication!

Viviez-vous, enfant, dans une société où la violence éducative est courante ?
Je ne saurais pas répondre à cette question, je ne crois pas.

Si vous avez voyagé et pu observer des pratiques coutumières de violence à l'égard des enfants, pouvez-vous les décrire assez précisément : quel(s) type(s) de violence ? par qui ? à qui (sexe, âge, lien de parenté) ? en quelle circonstance ? pour quelles raisons ? en privé ? en public ?
Je ne faisais absolument pas attention à ça à l'époque où je voyageais

Qu'est-ce qu'évoque pour vous l'expression « violence éducative ordinaire » ? Quels types de violence en font partie ? Et quelle différence faites-vous, le cas échéant, entre maltraitance et « violence éducative ordinaire » ?
Violence éducative ordinaire : tapes, gifles, fessées, tout ce qui peut faire mal physiquement à l'enfant quand il ne se comporte pas comme le pantin que nous voudrions diriger... Je dirais que la différence entre la maltraitance et la violence éducative ordinaire, c'est la capacité à se justifier... pour se donner bonne conscience. (Tu ne veux pas mettre ton manteau? tiens, prends ta fessée, tu l'as bien cherché, sale gosse = violence éducative ordinaire, personne ne vous dira rien, et on vous regardera même avec un regard compatissant... par contre, le père qui rentre bourré et qui castagne son enfant, c'est répréhensible par la loi = maltraitance.) Bien que la frontière entre les deux soit vraiment ridiculement minuscule...

Avez-vous des objections aux idées développées par l'OVEO ? Lesquelles ?
Je viens de découvrir le site, je n'ai pas encore tout lu, mais globalement, je pense que je ne vais pas trop avoir d'objections 😉

Comment nous avez-vous connus : site ? livre d'Olivier Maurel ? salon ? conférence ? autres ?
Lien Facebook (comme quoi, ça sert des fois!)

Ce site a-t-il modifié ou renforcé votre point de vue sur la violence éducative à l'égard des enfants ?
J'y arrive avec des idées qui doivent être similaires (j'ai lu Olivier Maurel, c'est son livre sur la fessée qui m'a ouvert les yeux)

Si vous acceptez de répondre, merci de préciser sexe, âge et milieu social.
Bientôt 32ans, profession libérale
Amélie.

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